Intervention en séance publique, lors de la discussion générale sur le budget de l’enseignement scolaire pour 2015. 

Il faut admettre que notre éducation nationale n’est plus adaptée aux besoins de notre temps. Les établissements scolaires devraient à la fois enseigner, éduquer et préparer tous les jeunes à devenir des adultes capables de gagner leur vie, en ayant été formés à un métier. Aujourd’hui, c’est loin d’être le cas. 

L’école primaire devrait enseigner à tous les enfants les savoirs fondamentaux – lire, écrire, compter -, tout en leur donnant des préceptes de morale, le goût du travail, de l’effort, de la discipline, du respect des autres et de la vie en société. Or, toutes les sélections ont disparu: plus de redoublements, plus de sanctions, plus de récompenses, plus de classements, plus d’examens, et bientôt plus de notes. 

En outre, il n’y a plus de certificat d’études pour passer du primaire au collège. Il a été supprimé par décret en 1989 par François Mitterrand. Il n’est plus, non plus, nécessaire de passer le brevet pour entrer au lycée. Tous les bacheliers intègrent les universités sans sélection. Malheureusement, nombre d’entre eux abandonnent deux ans plus tard, sans avoir reçu la moindre formation professionnelle. C’est ainsi que, chaque année, 150 000 jeunes quittent prématurément le système scolaire et deviennent des inactifs, voire des délinquants. Et le service militaire n’est plus là pour les sortir de leur inactivité, à cause de Jacques Chirac. 

Dans de nombreux pays, les jeunes travaillent pour intégrer les meilleures classes, les meilleures écoles, les meilleures universités. En France, la suppression de toute sélection, de toute volonté de réussite, de toute ambition, sans oublier la mise en place du collège unique par René Haby en 1975, nous ont fait perdre tous nos espoirs de développement futur. 

Seules certaines formations d’ingénieur ou de chercheur, certaines formations médicales ou quelques grandes écoles, comme Polytechnique, Centrale, HEC, procèdent encore à une sélection – il est difficile d’y être reçu – et dispensent une formation excellente au demeurant. 

Le collège unique est une catastrophe car il a conduit à la suppression de la formation professionnelle. En Allemagne, où le taux de chômage des jeunes est faible et où la formation professionnelle voisine avec la formation aux diplômes, les études s’effectuent dans deux collèges séparés, après une sélection à la sortie du primaire. On n’y mélange pas formation professionnelle et études générales. René Haby a unifié les structures administratives du premier cycle, qui sont toutes devenues des collèges et a mis fin à la scolarité en filières, lesquelles sont désormais indifférenciées. Le collège unique et l’unification des programmes ne laissent aucun choix aux élèves. Or, tous les élèves ne peuvent pas assimiler les mêmes connaissances. En outre, comme les élèves ne sont pas suivis, ils n’assistent plus aux cours et quittent le système à seize ans. N’ayant aucune possibilité de trouver un emploi, ils deviennent malheureusement inactifs et parfois délinquants, alors qu’ils auraient aimé pouvoir apprendre un métier en entrant en apprentissage à quatorze ans comme le font les allemands et bien d’autres. Malheureusement, l’éducation nationale ne s’intéresse pas à l’apprentissage et à l’alternance, qui sont contrôlés par les chambres de commerce et par les entreprises. 

Porter la durée de la scolarité à dix-huit ans, pour ceux qui à cet âge n’ont aucune formation, éviterait que les jeunes qui sortent du collège à seize ans ne soient abandonnés à eux-mêmes et permettrait de leur dispenser enfin une formation professionnelle. C’est ce que font les Missions locales financées par les communes et très peu par l’État, malheureusement. Le baccalauréat, présenté comme indispensable pour l’avenir de tous les jeunes, qui n’est utile qu’à ceux qui veulent faire des études supérieures, ne sert à rien pour tous ceux qui voudraient apprendre très jeunes un métier. 

Le développement de la délinquance est lié à l’inactivité forcée de ces jeunes : s’ils travaillaient, ils ne seraient pas délinquants. Ces jeunes ne naissent pas délinquants, mais le deviennent, parce qu’on ne leur a pas appris un métier, et ce n’est pas leur faute. Voilà la situation réelle dans nos communes, que j’ai moi-même vécue en tant que maire et président de Mission locale.